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Cambodge: procès du médecin accusé d’avoir provoqué une épidémie de sida dans un village

A gauche, Yem Chroeum lors de son arrestation. Photo fournie.

Le procès d’un  médecin cambodgien accusé d’avoir contaminé plus d’une centaine de personnes avec le virus du sida s’est ouvert mardi à Battambang.

Ce scandale sanitaire révélé en décembre 2014 avait mis en lumière l’indigence du système de santé dans les campagnes, s’appuyant largement sur des médecins sans diplômes.

Agé de 55 ans, Yem Chroeum qui soignait les habitants du village de Roka (district de Sangke, province de Battambang) depuis 1995 alors qu’il ne possédait aucun diplôme avait été arrêté le 23 décembre dernier, quelques jours seulement après la réalisation des premiers tests révélant une épidémie de grande ampleur.

Il avait immédiatement été inculpé de « meurtre », d’ « exercice illégal de la médecine », mais également d’« inoculation intentionnelle du virus du sida », une accusation étonnante que la cour se devra de prouver. Il risque la prison à vie.

A ce jour, on ignore le nombre exact de personnes infectées. Le dernier bilan de l’Autorité nationale de lutte contre le sida, rendu publique à la mi-décembre 2014, faisait état de 106 personnes contaminées sur les 2706 habitants de la commune de Roka parmi lesquelles de très jeunes enfants, des vieillards et des moines. Mais à cette date, seules 895 personnes avaient été contrôlées.
A la même date, l’institut Pasteur faisait état de 119 personnes contrôlées positives. Depuis, les autorités cambodgiennes ont adopté une stratégie de communication des plus réduite et aucun bilan précis n’a été rendu publique. La presse locale, elle, avance le chiffre de quelque 300 personnes contaminées. Une dizaine de patients sont décédés.

« Je veux que le tribunal me rende justice en menant une enquête approfondie sur cette affaire. Je n’avais aucune mauvaise intention à l’égard des patients et j’ai quelquefois soigné les familles pauvres sans exiger d’argent », a déclaré hier Yem Chroeum à l’ouverture de son procès.

L’accusé a répété qu’il avait appris les rudiments de la médecine dans les camps de Thaïlande où il était réfugié. Mais il a clamé son innocence, affirmant qu’il n’avait jamais utilisé de seringues ou d’aiguilles usagées depuis 1997, date à laquelle ce matériel médical était devenu largement disponible au Cambodge.

Mensonges, s’est écrié le procureur citant des propos contradictoires qu’il aurait tenus face aux policiers qui l’avaient interrogé.

Une centaine de personnes contaminées ont porté plainte contre le médecin, la plupart réclamant des compensations financières. Le procès doit se poursuivre durant quatre jours.

 

Krystel Maurice