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« The Last Reel » représentera le Cambodge aux Oscars

Le film « The Last Reel » (La dernière bobine) représentera le Cambodge dans la catégorie du meilleur film étranger aux Oscars 2016. La Commission de sélection du film cambodgien vient tout juste d’en faire l’annonce. Réalisé par la Cambodgienne Kulikar Sotho, dont c’est le premier long-métrage, ce film se veut une passerelle entre deux générations, celle brisée par la terreur khmère rouge et celle à qui on continue de taire le passé.

Le scénario, écrit par le britannique Ian Master, raconte l’histoire de Sophun, une lycéenne rebelle qui fuit la vie familiale dans laquelle elle étouffe. Lors d’une fugue à moto en compagnie de son petit ami, elle déniche, dans un bâtiment qui fait office de parking, un cinéma abandonné. Sur une affiche placardée sur le mur, elle reconnait sa mère. Elle découvre alors que la femme effacée et malade qu’elle connait était une star du cinéma, avant que celui-ci ne soit éradiqué par les Khmers rouges. Elle s’appelait Srey Mom et Sokha, le gardien du parking, en était éperdument amoureux. Il la croit morte et garde précieusement le dernier film qu’elle a tourné, sous sa direction, lorsqu’il était lui-même réalisateur. Mais la dernière bobine du film a été perdue. Sophoun propose alors d’achever le film et de le projeter en public en présence de sa star, sa mère.

La réalisatrice Kulikar Sotho, une femme d’affaires dynamique, a deux ans lorsque les khmers rouges entrent dans Phnom Penh. De son père elle ne sait rien et ne possède qu’une photo que sa mère lui a donnée lorsqu’elle était adolescente. Lorsqu’on lui propose le scenario, elle hésite. Elle n’a jamais réalisé de film mais elle a participé à plusieurs tournages dont celui de Lara Croft. Elle retrouve ses fantômes dans cette histoire et décide de se lancer dans l’aventure.

« The Last Reel » est une invite au dialogue pour briser l’incompréhension d’une jeunesse qui a perdu ses repères face aux douleurs d’une génération murée dans le silence. Mais cette dernière bobine est aussi un cri lancé au Cambodge pour qu’il renoue avec son passé et son héritage culturel dans ce qu’il a de plus beau, le cinéma notamment. De ce point de vue, le film a un atout de taille puisque Dy Saveth, figure emblématique du cinéma cambodgien d’avant les Khmers rouges, y interprète le rôle de Srey Mom (voir ici l’interview de Dy Saveth accordée à Arte).

« The Last Reel » a déjà remporté plusieurs prix internationaux parmi lesquels le prix du Festival international de Tokyo et celui du festival du cinéma asiatique d’Udine, en Italie.

L’an dernier, la Commission de sélection du film cambodgien n’avait présenté aucun film aux Oscars. En 2013, son choix s’était porté sur «L’Image manquante» de Rithy Panh qui avait ensuite été nommé parmi les cinq meilleurs films de la catégorie .

 

Krystel Maurice