Fête du Sillon Sacré: bons présages pour les récoltes
Phnom Penh, 12 mai 2009, 8H30. Revêtu de ses habits d’or, juché sur son trône, il pénètre dans l’enceinte sacrée, porté par ses gardes. Celui qui, cette année incarne le roi de Meak, gardien des greniers du Palais royal est le président de la Cour suprême du Cambodge, Dith Munthy. La cérémonie du Labour Royal qui a lieu chaque année sur l’esplanade Veal Mean, face au Musé national, marque le début de la saison des pluies et des travaux agricoles. Et c’est à ce haut dignitaire que revient ce matin l’honneur de perpétuer la tradition.
Tout de blanc vêtus, cheveux longs attachés en chignons, les brahmanes du Palais royal qu’on appelle les Bakou jouent un rôle très important dans cette cérémonie. Rituellement, cette fête a lieu le quatrième jour de la lune décroissante de mai. Durant les trois jours qui précèdent, les brahmanes prient Çiva, le dieu suprême de l’hindouisme qui rythme la vie et la mort. Cette divinité, très présente au Cambodge, est souvent représentée sous la forme du lingua. Une statue de Çiva est d’ailleurs installée dans chacun des cinq pavillons dressés pour l’occasion sur l’esplanade Veal Mean.
Mais, fonction des plus importantes aux yeux de la population, ce sont ces brahmanes qui, à la fin de la cérémonie, feront les prédictions sur la qualité de la récolte pour l’année à venir.
Précédent les attelages, les brahmanes prient en aspergeant la terre d’eau lustrale. Dans l’ancien royaume Khmer, cette eau purificatrice était versée sur les statues des divinités ou sur les personnages importants. Elle était le plus souvent contenue dans des bouteilles en terre cuite à haut col évasé comme celle que l’on voit sur cette photo. La conque avait également la même fonction.
La purification par l’eau lustrale est également pratiquée dans le bouddhisme, notamment à l’occasion du nouvel an. Au Cambodge mais aussi en Thaïlande, on asperge ce jour là les statues de bouddha de cette eau légèrement parfumée. Dans les familles, on asperge les ainés en signe de signe de respect.
La foule retient son souffle, espérant que les bœufs feront le bon choix. Le chef des Bakou observe attentivement la scène. Les bœufs se ruent sur le maïs et sur les haricots. Dans la foule, un homme se lamente et donne sa propre interprétation. Selon lui, les récoltes seront maigres puisque les bœufs ont dédaigné le riz.
Le chef des Bakou, qui a imploré les ancêtres a jugé, lui, que la récolte sera bonne même si l’eau ne tombera en grande quantité. Le royaume, lui, connaîtra la paix.
Texte et Photos Krystel Maurice